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Cultures-Haïti

Le décès d'Alix Balin

Tombeau pour un soldat de l'ombre : un hommage
  • Le décès d'Alix Balin
Genre : Décès de personnalités culturelles
Pays principal concerné : Rubrique : Littérature / édition
Mois de Sortie : 2010
Publié le : 25/07/2010
Source : source privée
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Alix BALIN, avocat freedom-fighter est décédé le 27 mai 2010 en Martinique où il tentait de traiter un cancer de la prostate. On trouvera ci-dessous un hommage à sa mémoire.

La lutte elle-même suffit à remplir un cœur d'homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux (Camus)

Avec Alix Balin disparaît une figure emblématique du militant révolutionnaire qui a marqué le continent américain au cours des années 60 et 70. Il n'a jamais cessé de mener sa lutte. Voici, pour lui, portée par les convictions qui le possédaient, une dernière adresse. Peut-être l'entendra-t-il lui qui croyait en l'existence d'un être transcendantal.

" Ton désir exclusif de changer le monde, ce monde malade comme tu disais, a orienté toute ta vie ; de cette vie, qui fut aussi une œuvre en soi par la pureté mystique de ses lignes, tu ne voulais pas faire un récit, car tu étais arc-bouté de tout ton corps à cette volonté passionnée d'enraciner tes rêves dans un lieu qui serait modelé par tes idées de justice humanisée, que ce fût en Haïti ou au Zaïre. Pour toi, tes idées façonnées d'abord par un marxisme peu orthodoxe, puis plus tard par la pensée de Cheik Anta Diop, ne pouvaient, elles, se résumer à ta vie individuelle, à laquelle tu t'intéressais si peu. Car si tu as ressenti ta vie comme un destin, tu la subordonnais totalement au bénéfice d'un bien partageable qui débordait ta propre destinée. Tes idées, tu en as fait, dans la dernière époque de ta vie, des écrits peu diffusés, engendrés charnellement dans le haut-fourneau de tes passions politiques. Pourtant, comment ne pas dire des choses de ta vie hors du commun…
… comment ne pas dire qu'à l'heure des jeux de billes tu as été emporté dès dix ans par la Révolution "noiriste" de 1946, que tu as préparé, dès l'adolescence ton corps et ton esprit par des exercices physiques et psychiques, comment ne pas dire que ta seule plaidoirie a été une attaque de l'Etat qui créait des conditions de vie telles qu'une femme a pu tuer une autre femme pour avoir accès à l'eau. Comment ne pas dire que tu as, en 1961, détourné un bateau de pêcheurs, pour rejoindre Cuba après une traversée hasardeuse de plus de deux jours.
Tu as quitté Cuba pour rejoindre à Paris un groupe de révolutionnaires haïtiens, les FARH et te former à la guérilla en Chine avec quelques-uns d'entre eux. Ta rencontre avec Stokely Carmichael te conduit à penser qu'il faut donner à la lutte une dimension africaine et te voilà en route, en 1969, vers le Zaïre en passant par l'Algérie. Après un premier séjour officiel de trois ans, à Kalémie, tu poursuis ton activité politique à Paris puis décides de rejoindre clandestinement en 1976, par le Burundi, la zone libérée à l'Est par L. Kabila. Trahi par un pseudo camarade, tu es accueilli après avoir traversé en barque le lac Tanganika … par les soldats de Mobutu et c'est une suite de prisons jusqu'à Kinshasa, puis Mbandaka et enfin l'ex-camp belge de relégation d'Ekafela en pleine forêt. Alors comment de pas dire ton évasion risquée, la poursuite des soldats et des chiens, et pendant un mois, la traversée aventureuse de la forêt jusqu'au fleuve et une cache à Kinshasa d'où tu rejoins la France en février 1978.
C'est alors que tu sembles avoir réorienté ta stratégie, en délaissant le terrain directement politique pour inventer par la création de petites entreprises au Bénin et à Paris des structures liant travail et lutte. Ton nouveau combat contre l'aliénation culturelle en t'appuyant sur la récupération de l'œuvre civilisatrice de l'Egypte noire et pour une économie endogène a nourri tes écrits et absorbé les dernières années de ta vie, sans jamais arrêter la quête d'un lieu où tu pourrais inscrire ton mouvement dans une histoire.
On a du mal à t'imaginer en repos, en repos éternel.

Paix à ton âme, comme tu aurais dit

Hacheldé

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