Ce deuxième long-métrage révèle le réalisateur ; Cette enquête fiction sur la jeunesse d'Algérie livrée au mirage du mauvais western et des magazines stupides est enlevée avec vivacité, un bonheur presque constant dans la mise en scène, une heureuse et très complice direction d'acteurs (presque tous des gosses) une grande justesse du regard et l'aisance la plus naturelle dans la prise de vue, mobile, astucieuse, attentive aux compositions de l'ombre et de la lumière. Par petites touches précises, qui appuient peu à peu mais qui marquent, le film éclaire la vie des enfants chez eux, miséreux, ou petits bourgeois - un repas servi, avec du vin à table -, à l'école et dans la rue.
Gorine, plus âgé, leur chef de bande (Gorine = Ringo) roulant à moto, dirige les larcins, règne et "juge"... L'intelligence c'est justement de ne pas nous faire prendre la place des juges : mais de nous donner les raisons de comprendre, et de nous amener à l'amour des autres plus qu'à la loi ou, si on préfère, à l'esprit plus qu'à la lettre. Les dernières images sont celles de la classe, les coupables absents ; et ces mots au tableau : "Classe du soir : le rôle du cinéma". Qu'on ne s'y méprenne pas : il n'y a d'autre romantisme dans Gorine que celui, à la fois tendre et cruel, qui appartient à l'enfance, et nulle sensiblerie. En ces années de mobilisation, Gorine est l'unique film arabe où la jeunesse, jouant son jeu nous donne une leçon de vérité.
Algérie, 1971, Long métrage
Titre : Gorine
Production RTA